25 août 2006

[Théâtre] Le Festival de Spa accueille Ghelderode (par MizAxton)


Comme chaque année, le festival du Théâtre et des Arts de la Scène succède aux Francofolies dans la ville de SPA. L’occasion de faire le point sur quelques unes des meilleures pièces de l’année, de participer à un dîner-spectacle, de rencontrer des auteurs et des acteurs, ou de découvrir le théâtre de rue.

Cette année, malheureusement, une seule pièce a pu être notée à mon agenda, faute de temps, mais pas n’importe laquelle : « La Balade du Grand Macabre », de Michel de Ghelderode.
Cet auteur belge incarne par essence l’imagination baroque du théâtre au début du 20è siècle et préfigure le théâtre moderne au même titre que Ionesco, Becket ou Strindberg. Rapidement adopté par la Flandres qui fera traduire et jouer ses premières œuvres, Ghelderode reçoit les honneurs internationaux fin des années 40, et voit Paris se lancer dans une « Ghelderodite aiguë ». Pressenti pour le prix Nobel de Littérature, il s’éteint en 1962, un premier avril, chose évidente de la part de cet excentrique farceur. Son théâtre fait de bric et de broc, tour à tour grave et drôle, onirique et réaliste, précis et farfelu, est toujours d’une qualité poétique, d’une précision d’écriture qui 45 ans plus tard impressionne encore.

Dans « La Balade du Grand Macabre », il met en scène la contrée de Breuguellande, utopie cachant à peine son inspiration belge, où un prince bégayant et fantoche s’occupe de gâteaux pendant que ses ministres joueurs tiennent les rênes du pouvoir. Mais voilà qu’un grand escogriffe répondant au doux nom de Nekrozotar met la ville en émoi, clamant la fin du monde pour minuit même… Temps mystique, espace fabuleux rappelant Breughel, truculence irrévérencieuse et passion débordante : tout l’univers de Ghelderode se retrouve dans cette pièce aux décors inspirés de Jules Vernes et de Terry Gilliam. La mise en scène de Stephen Shank s’accorde merveilleusement avec le texte de l’auteur, utilisant l’espace avec une rare intelligence, métamorphosant les décors de tableaux en tableaux, jouant de la profondeur et de la hauteur avec bonheur. Les prestations des acteurs (dont Pascal Racan, Philippe Allard, Didier Colfs ou Jessica Gazon) sont également à saluer, car les changements de ton et d’humeur sont permanents. Cette production du Théâtre des Galeries et de DEL Diffusion est idéale pour faire connaissance avec le théâtre de Ghelderode. La soirée (2h35’) est passée comme une flèche, me laissant le sourire aux lèvres, et la tête pleine d’étoiles, mais avec cependant deux regrets : ne pas avoir pu découvrir cette pièce dans sa présentation de juillet, au cœur des ruines de l’Abbaye de Villers-la-ville ; ne pas avoir pu prolonger le plaisir pendant la semaine et me rendre de salle en salle à la découverte des autres pièces et des auteurs.

Note pour plus tard : réserver mes billets pour le Festival de théâtre de SPA 2007 à l’avance.