
Peu avant le départ pour la quête, nous avons eu l’occasion d’interroger LJHugues sur son rêve dont voici le récit :
« Je sentais que j’avais eu une excellente idée de venir m’allonger à l’ombre sous cet arbre, au bord de la rivière. J’avais fermé les yeux et je m’étais assoupi. Les oiseaux pépiaient joyeusement, le vent caressait ma peau et l’onde claire de la rivière chantait à mes oreilles. L’onde claire qui palpitait comme un coeur, l’onde claire qui ricochait sur les roches et qui m’éclaboussait le bras et le visage alors que je m’endormais. Et je pensais :
L’ombre me garde au frais, l’ombre me protège, l’ombre et l’onde se confondent, l’onde et l’ombre se dérobent…
Voici que la fraîcheur de l’onde effleure encore mon bras. Les clapotis se multiplient, mais… je ne le sais pas, car mes yeux clos et le sommeil qui me gagne m’empêchent de réagir, le lit sur lequel je m’endors devient le lit de la rivière. Voici le matelas qui avance sous moi, comme une mare qui s’étend, file sous mon dos, ma tête et mes jambes. Voici la rivière sous moi, et moi dans la rivière. Voici le froid qui m’engourdit pendant que le niveau de l’eau grimpe le long de ma peau, voici que je m’enfonce ou que l’eau monte et me voici prêt à hurler lorsque l’eau me pénètre dans les oreilles et le nez, qu’elle me chevauche. J’ouvre la bouche pour crier mais l’eau est déjà dans ma gorge et soudain je n’ai déjà plus pied.
Alors mon corps s’est réveillé, mes yeux se sont ouvert, je me suis mis à crier mais aucun son ne sortait de ma bouche, aucune bulle d’oxygène. Je me suis mis à agiter les bras et les jambes, cherchant ma direction, incapable de savoir si j’avais la tête à l’envers ou à l’endroit, incapable de savoir qu’il n’y ni haut ni bas.
Ensuite un courant rouge comme le sang a lentement tourbillonné devant moi, un trait diffus qui se perdait dans les vagues intérieures de l’Océan, une traînée rouge qui s’étiolait, et s’effilochait, et se dandinait en tournant tout autour de moi. Rouge comme le sang et semblant couler hors de mes propres bras.
J’essayais de fuir et j’agitais les membres pour nager, mais mes gestes larges me laissaient au même endroit, sur place.
C’est alors qu’il est apparu ! Son visage démesuré, large et déformé était brusquement derrière la paroi de verre du bocal dans lequel j’étais enfermé, comme un poisson. Le squelette me regardais de l’extérieur et il se mit à tapoter sur la vitre pour me narguer. L’échos de ce coup du bout de son doigt d’os jaillit comme une masse assourdissante qui me traversera de part en part. L’échos souffla quelque chose en moi comme si mon corps avait soudain gonflé d’eau et que ma peau avait céder pour me laisser déchiré de toutes parts…
Et Elle était là !
J’ignore comment et pourquoi, mais elle était en moi.
Les mots étaient gravés et ma mémoire ne connaissait plus que ceux-là. Je voulais appeler à l’aide, je voulais crier un nom, je voulais implorer la déesse, mais ma bouche n’arrivait à dire que :
« Pour que les lavent les larmes de Shakya,
Un autre ressoudera le bol du pardon.
Humaine sera la quête de celui-là,
Qui, pour réussir, devra assurer l’union »
Et ces mots-là avaient un goût de sel dans ma bouche.
Je me suis réveillé en criant : les larmes de Shakya ! »
« Je sentais que j’avais eu une excellente idée de venir m’allonger à l’ombre sous cet arbre, au bord de la rivière. J’avais fermé les yeux et je m’étais assoupi. Les oiseaux pépiaient joyeusement, le vent caressait ma peau et l’onde claire de la rivière chantait à mes oreilles. L’onde claire qui palpitait comme un coeur, l’onde claire qui ricochait sur les roches et qui m’éclaboussait le bras et le visage alors que je m’endormais. Et je pensais :
L’ombre me garde au frais, l’ombre me protège, l’ombre et l’onde se confondent, l’onde et l’ombre se dérobent…
Voici que la fraîcheur de l’onde effleure encore mon bras. Les clapotis se multiplient, mais… je ne le sais pas, car mes yeux clos et le sommeil qui me gagne m’empêchent de réagir, le lit sur lequel je m’endors devient le lit de la rivière. Voici le matelas qui avance sous moi, comme une mare qui s’étend, file sous mon dos, ma tête et mes jambes. Voici la rivière sous moi, et moi dans la rivière. Voici le froid qui m’engourdit pendant que le niveau de l’eau grimpe le long de ma peau, voici que je m’enfonce ou que l’eau monte et me voici prêt à hurler lorsque l’eau me pénètre dans les oreilles et le nez, qu’elle me chevauche. J’ouvre la bouche pour crier mais l’eau est déjà dans ma gorge et soudain je n’ai déjà plus pied.
Alors mon corps s’est réveillé, mes yeux se sont ouvert, je me suis mis à crier mais aucun son ne sortait de ma bouche, aucune bulle d’oxygène. Je me suis mis à agiter les bras et les jambes, cherchant ma direction, incapable de savoir si j’avais la tête à l’envers ou à l’endroit, incapable de savoir qu’il n’y ni haut ni bas.
Ensuite un courant rouge comme le sang a lentement tourbillonné devant moi, un trait diffus qui se perdait dans les vagues intérieures de l’Océan, une traînée rouge qui s’étiolait, et s’effilochait, et se dandinait en tournant tout autour de moi. Rouge comme le sang et semblant couler hors de mes propres bras.
J’essayais de fuir et j’agitais les membres pour nager, mais mes gestes larges me laissaient au même endroit, sur place.
C’est alors qu’il est apparu ! Son visage démesuré, large et déformé était brusquement derrière la paroi de verre du bocal dans lequel j’étais enfermé, comme un poisson. Le squelette me regardais de l’extérieur et il se mit à tapoter sur la vitre pour me narguer. L’échos de ce coup du bout de son doigt d’os jaillit comme une masse assourdissante qui me traversera de part en part. L’échos souffla quelque chose en moi comme si mon corps avait soudain gonflé d’eau et que ma peau avait céder pour me laisser déchiré de toutes parts…
Et Elle était là !
J’ignore comment et pourquoi, mais elle était en moi.
Les mots étaient gravés et ma mémoire ne connaissait plus que ceux-là. Je voulais appeler à l’aide, je voulais crier un nom, je voulais implorer la déesse, mais ma bouche n’arrivait à dire que :
« Pour que les lavent les larmes de Shakya,
Un autre ressoudera le bol du pardon.
Humaine sera la quête de celui-là,
Qui, pour réussir, devra assurer l’union »
Et ces mots-là avaient un goût de sel dans ma bouche.
Je me suis réveillé en criant : les larmes de Shakya ! »