

L’auteur étant très prolifique, les adaptations s’enchaînent, surfant sur la vague née avec Carrie. Au début des années 80, Tobe Hopper adapte ainsi à l’écran Les vampires de Salem, lugubre modernisation du mythe. Mais c’est surtout Shining, que réalise l’immense Stanley Kubrick qui fait l’actualité. Nul besoin de revenir sur ce film marquant, le seul où la personnalité du cinéaste éclipse celle du romancier, qui d’ailleurs a renié le résultat, préférant produire des années plus tard sa propre version pour la télévision. Qu’importe, l’interprétation possédée de Jack Nicholson suffira à faire entrer Shining au panthéon des films cultes. David Cronenberg adapte The Dead Zone en 1983 et la même année, le spécialiste John Carpenter réalise Christine, mais c’est une voiture, une Plymouth rouge, qui est cette fois en vedette. Le modeste artisan Lewis Teague se surpasse lui aussi pour Cujo, huis-clos suffocant, où un Saint-Bernard atteint par la rage attaque une femme et son fils dans leur voiture. Toutes ces réussites suscitent les convoitises, et bientôt le nom de « King » devient une marque déposée qu’il faut absolument exploiter, et, forcément, en dépit du bon sens.Peu après, Misery touche aussi au but : on y suit le calvaire d’un écrivain à succès (James Caan), séquestré par une de ses fans psychotiques. Un film incroyablement tendu et brutal, pour lequel Kathy Bates recevra un oscar.
Maintenant que son nom n’est plus automatiquement lié à l’horreur, Stephen King peut se diversifier : le drame familial avec Dolores Claiborne, la fable fantastique (La ligne verte, Coeurs perdus en Atlantide), l’épopée carcérale (Les évadés), l’heroic-fantasy (la saga « La tour sombre »)... Quelques titres viennent rappeler que l’homme n’est jamais aussi bon que lorsqu’il explore les abîmes les plus noires de notre monde moderne, qu’elle enfante des monstres bien réels (l’ancien bourreau nazi d’un Elève doué) ou totalement imaginaire (le pilote-vampire du méconnu The night flier). Toutefois, le nouveau siècle verra se raréfier les adaptations pour le grand écran du romancier. Marqué par un terrible accident de voiture, Stephen King prend du recul sur son oeuvre, notamment via l’essai «Ecriture », et ralentit son rythme de travail. Cela donne encore de nouvelles oeuvres marquantes en librairie (le recueil de nouvelles « Tout est fatal », « Cellulaire »), moins à l’écran : Fenêtre secrète, Dreamcatcher, Riding the bullet, Désolation, autant de séries B qui n’ont guère marqué les esprits.
Il faut attendre 2007, avec le succès commercial de Chambre 1408, et la réussite indéniable de The Mist, adapté de vieux récits de l’auteur, pour que le nom de Stephen King excite à nouveau Hollywood : Eli Roth, réalisateur de Hostel, prépare Cellulaire, Frank Darabont devrait s’attaquer à Marche ou crève, et Tobe Hopper à From a buick 8. L’originalité intemporelle des récits du King, la grande variété de ses oeuvres, écrites en à peine une trentaine d’années, expliquent ce renouvellement d’intérêt constant de la part des producteurs.